01 mai 2016

PHILO KOLA : Elle fait semblant


Ecouté pour la première fois chez British Library Sounds le 28 avril 2016
Réf : Syliphone 4-637-01 et CEAP608/8278 -- Issu des archives Syliphone de la Radio Télévision Guinéenne et diffusé par la British Library en 2016
Support : 1 fichier
Titre : Elle fait semblant

Malheureusement, je n'ai pas le disque dont la pochette est ci-dessus, mais c'est quand même plus sympa avec une illustration, et, de toute façon, il va bien falloir que je continue à faire évoluer mes modes d'écoute de la musique.
Cette année, peut-être pour de bon, ça devient vraiment difficile de trouver de bonnes affaires sur les vide-greniers par chez moi. La météo n'y met pas du sien, certes, mais surtout l'offre semble vraiment s'appauvrir (ou les prix augmenter exponentiellement). Cela fait plusieurs années que je suis content de viser des disques insolites, obscurs ou "exotiques" mais, depuis l'automne 2015, je ne trouve quasiment rien d'intéressant et si ça dure je ne continuerai pas à passer une partie de mes dimanches matin à naviguer entre capsules de bouteilles de Champagne et vêtements et jouets d'enfant.
Donc, on ne compte plus seulement sur les disques pour découvrir de la musique et, avec Internet notamment, on a de toute façon de quoi s'occuper pendant plusieurs vies.
Par exemple, sur le site de la bibliothèque nationale britannique, on trouve des collections d'enregistrements sonores.
Là, je me suis seulement intéressé aux musiques du monde et traditionnelles et, pour l'Afrique, à la collection du label Syliphone.
Ça faisait encore beaucoup (7781 enregistrements), alors j'ai sélectionné les titres en français, j'ai commencé à écouter et je me suis régalé.
Notons que tous les titres des collections sonores sont en écoute intégrale gratuite sur le site de la British Library (avec parfois des limitations pour certains pays pour des raisons des droits).
Je ne sais pas comment la numérisation est financée en Angleterre, mais en France, où la musique n'a jamais été prioritaire par rapport au livre (et ne bénéficie pas des mêmes aides), la Bibliothèque Nationale, très en retard sur la question, en a été réduite à se lancer dans un horrible partenariat public-privé à la Sarkozy : 5 M € d'argent public sur un budget de 15 M € pour numériser des disques et des livres anciens, plus le travail des agents de la BnF pour la sélection des documents, leur mise en ligne et l'archivage pérenne. Si, au bout du compte, les documents avaient été librement accessibles pour tous en ligne, ça m'aurait moins énervé. Mais non, seuls des extraits sont pour l'heure disponibles sur la bibliothèque numérique Gallica. Certes, il y a de nombreux documents intégralement en écoute, sur YouTube par exemple, mais la société privée partenaire bénéficie d'une exclusivité de commercialisation pendant dix ans. Alors, jusqu'en 2022, pour écouter des disques de collections publiques numérisés en grande partie sur fonds publics, il faut payer, par exemple 5,99 € pour un récital de 1961 de Charles Trenet sur Amazon. Grrrr !
Bref, calmons-nous, restons en Angleterre, et apprécions ce que nous propose la British Library.
Sa collection Syliphone n'est pas le résultat de la numérisation de disques, mais rentre dans le cadre d'un programme de sauvetage d'archives en danger. Le label Syliphone de Guinée est très particulier : c'est un label d’État, créé dans les années 1960 dans le cadre de la politique culturelle d' "Authenticité" du Président Sékou Touré. On ne s'attend pas à ce que, dans un tel cadre, une création artistique de qualité soit produite, mais c'est pourtant le cas avec Syliphone.
C'est à l'australien Graeme Counsel que l'on doit ce travail. Dans le chapitre Music for a revolution: the sound archives of Radio Télévision Guinée du livre From Dust to Digital: Ten Years of the Endangered Archives Programm, il explique comment, de collectionneur de disques du label, il est devenu archiviste-sauveteur des archives de Télé Radio Guinée, après avoir appris que la collection nationale des disques Syliphone avait été bombardée lors d'une tentative de coup d'état en 1985. En trois campagnes, entre coups d’État et attentats, il a pu sauvegarder des centaines de bandes magnétiques et c'est le résultat de son travail qui est disponible depuis janvier 2016.
Parmi les quelques titres en français de cette immense archive que j'ai écoutés, j'ai sélectionné Elle fait semblant de Philo-Kola.
Philippe Kola Ntalulu, dit Philo-Kola, est mort à La Verrière dans les Yvelines en mai 2012. Il est surtout réputé pour avoir été le bassiste des orchestres African Fiesta National et Afrisa International de Tabu Ley Rochereau, mais il a sorti au moins deux albums sous son nom, Elle fait semblant à la fin des années 1970 et Elle me rend fou en 1984.
La chanson Elle fait semblant m'a plu, notamment parce qu'elle m'a fait penser à Jeannot de Lolo Lolitta et Tchico : c'est presque un sketch, ou une mini-pièce de théâtre, avec un dragueur qui interpelle "Bonjour ma soeur" et qui se plaint ensuite de la réaction de la fille : "La femme africaine, où est ta gentillesse ?". Il la salue en différentes langues, et à chaque fois elle ne répond pas et les chœurs interviennent : "Elle me répond toujours pas, Hey, en me disant, Hey, est-ce que tu me connais ?".
Ce document vient donc des archives de RTG et a été inclus dans la collection des archives Syliphone, mais je ne pense pas que ce titre a jamais été publié par ce label. D'abord, il ne figure pas dans le catalogue exhaustif de Graeme Counsel. Ensuite, Discogs ne mentionne à ce jour qu'une édition de l'album, chez Appolo Musique en Côte d'Ivoire.

Elle fait semblant

Parmi tous les titres en français de l'archive que j'ai écoutés, il y a de très bonnes choses, et quelques horreurs, surtout datées des années 1980 et 1990, avec une production "moderne" déjà très datée. Mais même dans ces années-là, il y a de grandes réussites.
Voici, sans ordre particulier, ma sélection de l'archive :

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un seul mot: magnifique. Pour la question de la numérisation: hélas on n'est pas étonné de l'attitude de la BN et de l'état. Et dire qu'on se gargarise de l'idée d'exception culturelle.Cette exception repose aussi sur l'élitisme et l'impérialisme culturel français tant pis pour tous les simples citoyens aficionados de musiques . Enfin , restons positifs Renaud a sorti un disque,Polna revient chanter au pays, ça c'est chouette, cacahuète! ph